Communiqué contre la nouvelle loi électorale tunisienne du 15 septembre 2022

Communiqué contre la nouvelle loi électorale tunisienne du 15 septembre 2022

Une nouvelle loi électorale a été promulguée le jeudi 15 septembre 2022 au Journal Officiel, par le Président de la République Tunisienne Kaïs Saïed. Elle comprend des mesures inacceptables, que nous devons dénoncer :
– Individualisme Parlementaire : Le Président de la République, après s’être octroyé la quasi-totalité des pouvoirs, affaiblit désormais les formations politiques au Parlement. En effet, cette nouvelle loi électorale appelle les Tunisiens à élire leurs députés individuellement et non plus en votant pour un système de listes.

– Précarisation du mandat électoral de député : La menace permanente d’une motion de défiance précarise le mandat de député car il suffit de 10% du corps électoral pour le destituer.

– Suppression de la parité horizontale et verticale : Cette nouvelle loi supprime la parité horizontale (listes électorales contenant un nombre égal des femmes et d’hommes) et la parité verticale (alternance entre les femmes et les hommes dans la même liste) imposées précédemment aux listes de candidats. Il s’agit d’une mesure régressive grave car elle représentait un des acquis du précédent mode de scrutin. Maintenir la parité uniquement pour les parrainages des candidats est rétrograde et scandaleux.

– Système de parrainage excessif : En outre, chaque candidat doit présenter une liste nominative de quatre cents électeurs inscrits dans la circonscription électorale, identifiée par des signatures légalisées. La moitié doivent être des femmes, à condition que le nombre de moins de trente-cinq ans ne soit pas inférieur à 25 %. Cette mesure irréaliste et coûteuse risque de ralentir voire bloquer les services de l’Etat et les collectivités locales déjà surchargés. Par ailleurs, cela ne peut qu’encourager l’abstention déjà élevée.
– Réduction du nombre de circonscriptions : Cette loi réduit le nombre de circonscriptions à 151 en Tunisie et à 10 à l’étranger, soit 161 sièges au total (un siège par circonscription) au lieu de 217 sièges précédemment dont 18 à l’étranger.

– Eviction des candidatures binationales sur le territoire Tunisien : Citons l’article 19 de cette nouvelle loi : « La candidature pour les législatives est un droit pour tout électeur ou électrice né de père ou de mère tunisienne et n’ayant pas une autre nationalité que celle tunisienne pour les circonscriptions du territoire Tunisien au nombre de 151 ». Les citoyens Tunisiens binationaux ne peuvent donc se présenter qu’au niveau des circonscriptions de l’étranger. Ainsi, tous les citoyens possédant une double nationalité seront déchus de leurs droits civiques d’être candidats, en vertu de cette nouvelle loi.

Les Tunisiens résidents à l’étranger méritent un traitement d’équité et une représentativité égale à leurs concitoyens en Tunisie. La Tunisie a une population estimée à 12 millions en 2022 et les tunisiens à l’étranger sont environ 1 700 00 résidents dans plus de 108 pays, sur les cinq continents (dont plus de la moitié en France). Ils représenteraient plus de 12%, du corps électoral, donc en respectant la proportionnalité des TRE, une vingtaine de sièges devraient leur être alloués dont la moitié pour la France.

Passer de 18 sièges à 10 sièges pour les TRE et les répartir d’une manière arbitraire sans aucun respect de la répartition réelle des TRE dans le monde (en France on passe de 10 sièges en 2019 à 3 avec 1 siège pour France Nord et 2 sièges pour France Sud, en Italie on passe de 3 à 1 siège et on maintient le nombre de sièges pour le reste du monde) constituent des discriminations supplémentaires.

Nous, signataires, dénonçons cette loi aux triples discriminations : parité femmes hommes inexistante, binationaux déchus de leur citoyenneté et représentativité des TRE amoindrie et arbitraire.
Nous appelons le Président Kaïs Saïed à revoir cette loi pour tenir compte des TRE afin de maintenir les aspirations et les acquis citoyens de la révolution du 17 décembre 2010 / 14 Janvier 2011.

Nous refusons l’exclusion d’une partie de la population et rappelons qu’«une démocratie doit être une fraternité, sinon, c’est une imposture» (Antoine de Saint-Exupéry).

Premiers signataires :

Belgique
• Le Comité de Vigilance pour la Démocratie en Tunisie – Belgique

France
• Association Démocratique des Tunisiens en France (ADTF)
• Association des Tunisiens en France (ATF)
• Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT)
• Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR)
• Imagecom (France )
• Mouvement Citoyen des Tunisiens en France (MCTF)
• Réseau Euro-Maghrébin Citoyenneté et Culture (REMCC)

Italie
• Comitato Immigrati Tunisini In Italia (CITII)

Suisse
• Le pont Genève

Author: CVDTunisie